Lettre de l'OHP - No.14

Les étoiles de type A avec Elodie

Suzanne Grenier, Ana Gómez
Observatoire de Paris

Robert Burnage
Observatoire de Haute-Provence

Rosanna Faraggiana
Dipartimento Astronomia Università Trieste

Michele Gerbaldi
Institut d'Astrophysique de Paris

Les étoiles de type A se caractérisent par la présence d'un grand nombre d'étoiles particulières ainsi que par des vitesses de rotation allant de 0 à 300 km/sec. Bien que le spectrographe Elodie permette le choix du "masque" numérique le mieux adapté au type d'étoile considéré, son utilisation pour les étoiles A demandait vérification.

Pourquoi étudier les étoiles A faibles? Des étoiles A ont été observées à des distances supérieures à 700 pc. Les études effectuées montrent que ces étoiles représentent un mélange d'étoiles de Populations I et II. La plus grande partie d'entre elles ont des gravités correspondant à celles d'étoiles de séquence principale ayant un âge inférieur à 109 ans. Cet âge est incompatible avec leurs caracteristiques cinématiques: dispersion de vitesse perpendiculaire au plan galactique d'environ 60 km/sec, valeur intermédiaire entre celle des étoiles du disque épais et du halo. Par ailleurs, la composition chimique observée est aussi inattendue: elle varie entre un tiers de la métallicité solaire et l'abondance solaire. Aucun des paramètres: âge, abondance et cinématique n'est consistant l'un avec l'autre, ces étoiles n'obéissent pas aux modèles conventionnels de structure galactique et d'évolution.

Les données de parallaxe et de mouvements propres d'Hipparcos seront bientôt disponibles (1997 pour l'ensemble de la communauté). Un effort a été fait pour obtenir les vitesses radiales des étoiles plus brillantes que 9. Or cet échantillon ne permettra pas de dépasser une distance d'environ 500 pc. Par contre, une meilleure calibration de la magnitude absolue des étoiles chaudes sera obtenue. Elodie est le seul instrument, à l'heure actuelle, capable de nous donner à la fois une vitesse radiale précise jusqu'à la magnitude 13 et la possibilité d'acquérir les paramètres physiques et chimiques d' étoiles A et donc de nous éloigner du voisinage solaire. En ce qui concerne la composition chimique, l'avantage exceptionnel d'Elodie est le grand domaine spectral couvert en une seule observation. Jusqu'à présent, la composition chimique des atmosphères d'étoiles chaudes en rotation moyenne ou forte est très mal connue en raison du très grand nombre de raies qui se superposent dans la région bleue du spectre rendant difficile la détermination correcte du continu. Deux autres résultats interessants sont l'étude de la binarité (à partir de la découverte de nouvelles binaires) et la détermination de la fonction de distribution non gaussienne du v sin i des étoiles A.

Avant de démarrer cette étude, il s'avérait nécessaire de tester l'instrument sur les étoiles A. Dans le but d'obtenir la vitesse radiale en temps réel, un masque a été fabriqué à partir d'un spectre synthétique calculé avec les modèles de Kurucz à partir des programmes implantés à Trieste par F. Castelli. Les paramètres du modèle étaient les suivants: Teff = 8500deg.K, log g = 4.0, v sin i = 5, 50 et 100 km/s et abondance solaire. La sélection des raies a été faite sur des critères purement astrophysiques: raies non blendées pour un v sin i de 50 km/s ou blendées avec le même élément dans le même état d'ionisation et un potentiel d'excitation voisin. Cette limitation du nombre de raies sélectionnées (264) a eu pour conséquence de donner un pic de corrélation peu profond mais très propre et fiable. Un tel masque s'est avéré valable pour un v sin i allant jusqu'à 80-100 km/s. Une meilleure optimisation de ce masque pourrait être obtenue en tenant compte du rapport S/N en chaque point du spectre.

Figure 1. Le spectre de l'étoile binaire HD 174933 de type B9HgMn a été corrélé avec notre masque puis le masque K0, ce qui permet de différentier les deux composantes du système.

Parmi les étoiles observées, de nouvelles binaires ont été détectées. Afin de repousser la limite en v sin i et d'augmenter la profondeur du pic de corrélation de toute étoile entre B8 et A9, l'étape suivante est de corréler les spectres entre eux. L'avantage essentiel est d'augmenter le nombre des raies sélectionnées, la connaissance et la précision des probabilités de transitions atomiques n'étant plus alors nécessaires. D'autre part, la fabrication de plusieurs masques, en particulier pour les étoiles B8-A2 et A3-A9, à partir de spectres synthétiques calculés avec différents paramètres est en cours. Enfin la corrélation des spectres avec une grille de spectres synthétiques de différents v sin i, Teff et log g est prévue.

Les observations réalisées en juin 94 confirment la valeur d'Elodie pour l'obtention de la vitesse radiale et les paramètres fondamentaux d'étoiles A.